Franz Kafka est mort il y a un siècle aujourd’hui, le 3 juin 1924. Le temps écoulé jusqu’à nous s’est comprimé et tourne sur sa pointe, immobile. Le temps acrobate est suspendu en l’air. Le temps attend. Il a fini par s’incliner et pencher comme la tête de Kafka. Lui est jeune encore et déjà vieux, en filigrane dans un seul regard. L’histoire, n’est-ce pas, est devenue celle qu’il a dite. Le Journal est inutile. La vérité y apparaît sans voile, donc voilée, le droit se révèle sans droit, donc pure violence, notre finitude est devenue si mince, comme les personnages qu’il a dessinés, et s’est réduite à l’initiale. La langue qu’il a écrite est sans manière, c’est à peine une langue, maigre elle tousse et couine parce qu’elle parle encore comme une voix dans le gras de la nuit et de l’époque, elle fend la nuit du bavardage à coups de hache, elle s’écrit par ces pas gris dans la monotonie de la neige.
Il fait (il le devrait, au moins aujourd’hui à relire la moindre page) éprouver de la honte à ceux qui se croient poète, écrivain ou philosophe.
Il n’a rien réclamé, n’a pas fait sa réclame, n’a posé à personne la moindre question, n’a jamais jugé.
3 juin 2024 : K. m’a réveillé ce matin de mon insomnie.
© André Hirt
Image : Franz Kafka, 1924-2024, jeune et âgé.
© André Hirt, Pastel à l’huile.
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