Le dernier chapitre de l’ouvrage, Beethoven IV (L’Autre musique), traite du Quatuor n° XV, opus 132, de Beethoven.

Avec cet ouvrage s’achève, après Chantier Faustus (Kimé 2017) et La Dernière sonate (Kimé 2022), la trilogie consacrée aux problématiques engagées par Thomas Mann dans son roman Le Docteur Faustus.

En même temps que la civilisation et la culture s’effondraient, Thomas Mann, dans Le Docteur Faustus, roman rédigé entre 1943 et 1947, concevait le personnage du musicien pas si imaginaire que cela Adrian Leverkühn en proie aux effets du Pacte contracté avec le Diable qui, pour finir, le poussera dans la folie. La musique, la création et l’inspiration en général ne sont-elles vraiment possibles que par la médiation d’un Pacte de ce type dans le but de conjurer la réalité comme les risques de la stérilité en s’appropriant ainsi les pouvoirs du génie ? Faisant suite aux avertissements auxquels on resta bien trop sourds de Nietzsche et de Freud, on doit se demander avec lucidité comment la musique et avec elle la plus haute culture peuvent s’avérer à ce point douteuses à l’égard de leurs propres exigences et prétentions.

Toutefois, ne voit-on pas la musique lutter en son propre sein, ainsi que le fit exemplairement celle de Beethoven, dans le but d’opérer la percée, comme sous la poussée de la pensée elle-même, vers sa plus haute mais aussi sa plus sensible destination ?

À travers quelques moments décisifs du roman de Thomas Mann, l’évocation de la Heiterkeit (la « sérénité ») de Mozart, La Petite Sirène d’Andersen, l’Essai sur le Théâtre de marionnettes de Kleist, et en suivant la tension au cœur de la musique de Beethoven entre l’affirmation héroïque, la jubilation assez douteuse de l’Hymne à la Joie de la IX° Symphonie par exemple et la sobriété du XV° Quatuor à cordes, on percevra en pensée, comme passant par un de ses très mince rai, les Lumières, qui ont historiquement échoué, se réfléchir et engager envers et contre tout, par la grâce d’une ressource insoupçonnée, une autre promesse d’humanité et de paix.

À l’écoute (Youtube) le XV° quatuor, opus 132, de Beethoven dans une très belle version par le quatuor Alban Berg :